dimanche 30 décembre 2007

STICEJU

C'est long mais c'est bon, et ce, plus grâce aux réponses qu'aux questions.
Une vraie machine de guerre.







Est-ce que vous avez l’impression d’assister à un renouveau de l’électro française, dont vous seriez un peu les chefs de file ?

Xavier de Rosnay : En fait, j’ai l’impression qu’il y a toujours eu des trucs cools qui se sont passés en France en musique électronique. Juste avant qu’on ne fasse le disque, il y avait Jackson qui a peut-être fait un des meilleurs disques d’électro français. Et il y avait aussi Oizo ou Ark. La musique change tout le temps en ce moment, c’est vrai, mais je n’ai pas l’impression qu’il y a eu dix ans de rien jusqu’à maintenant. Je pense que c’est juste par chance que la presse musicale française et internationale s’est intéressée à ce qui se fait en France en 2005-2006-2007. Et par chance encore, nous on fait de la musique électronique en France en 2005-2006-2007 et je ne sais pas combien de temps tout cela va durer. On a la chance d’être au bon moment au bon endroit. Mais après ça, on ne se sent pas du tout chefs de file.



Mais est-ce que ce nouvel intérêt n’est pas dû aussi à une émergence de nouveaux labels comme Edbanger par exemple ?

X : Peut-être mais j’ai l’impression que c’était déjà le cas avant et je sais qu’il y a eu une amorce de ça avec Carat et la techno minimale française. Après, c’est un truc de circonstances. Et je ne dis pas ça par fausse modestie mais je ne suis pas sûr que ce qui se passe maintenant soit plus intéressant que ce qui se passait avant. Là, on a la chance d’avoir une espèce de dynamique assez forte mais qui est exactement ce qui s’est passé il y a trois ans à New York avec le disco-punk/post punk. Je ne sais pas qui seront les prochains mais là le timing est plus important que tout, beaucoup plus que le renouvellement supposé de la musique ou de la scène musicale.



Mais vous semblez retenir l’attention depuis longtemps, maintenant…

Gaspard Augé : Peut-être parce qu’on est juste un peu plus décomplexés et moins activistes, moins élitistes, moins puristes.

X : La musique qu’on fait est peut-être plus accessible. Et encore, je ne suis pas sûr. Quand on a fait Waters of Nazareth il y a deux ans, les premières fois où on l’a jouée, on l’a essayée et ça ne faisait pas du tout danser les gens. Les ingénieurs du son venaient et essayaient de réparer, de rebrancher les câbles (rires). Mais c’est un morceau qui a fini par devenir un peu malgré lui une sorte de standard d’électronique parce qu’après il y a eu une grande vague de distorsion, alors que nous, au départ, on a essayé de faire le morceau le plus bruitiste possible. Cela dit, honnêtement, je crois qu’il y a une grosse part de timing et de chance et on est vachement conscient de ça : on avance aussi en prenant en compte ces paramètres-là, on essaie de ne pas trop se poser de questions. On sait qu’il y a la chance, la dynamique et que c’est difficilement maîtrisable. On a réussi à attraper ça et le but c’est de dépasser l’effet de mode pour que quand il s’arrêtera - parce qu’il va forcément s’arrêter à un moment mais je ne sais pas combien de temps ça dure – on puisse continuer à exister. Avec Gaspard, on n’a pas une énorme culture électronique, au départ. On écoute surtout de la pop – après, il y a le hip-hop, le métal qui rentrent là-dedans - et on essaie de faire de Justice un groupe pop, non pas pour vendre plus de disques mais dans le sens où le fond de la musique puisse être suffisamment simple pour aller plus loin qu’un effet de mode qui reposerait uniquement sur la production. Pour que les chansons puissent rester. Quand on écrit les morceaux, on les écrit toujours de manière très conventionnelle, toutes les bases sont faites avec un piano. Après on produit, mais le fond des morceaux est toujours assez pop parce que ça reste des gimmicks assez simples, des mélodies, pour que quand ce type de production ne sera plus frais, au moins, reste une base émotionnelle. Et c’est ça qui est important, c’est ça qui nous intéresse dans la musique. Quand tu achètes des disques de Sly, c’est super mal enregistré mais les chansons sont tellement mortelles que quelle que soit la production, ça marche. Pareil avec les Beatles, où tu as parfois les voix d’un côté et tout le reste de l’autre : c’est inécoutable au casque. Mais ça relativise l’importance de la production dans le processus musical. Même si c’est important et que c’est agréable quand ça sonne bien. Finalement ça n’est pas ça le plus important. Et souvent les courants musicaux restent une affaire de production et moins de chansons .



Quand vous composez, vous partez toujours d’ une ligne mélodique ?

G : Ouais.

X : Il y a deux morceaux sur le disque où on est parti d’un sample. Phantom, par exemple,parce que ça faisait partie de l’idée du morceau de partir d’une boucle et de faire des petits clins d’œil à la French Touch.



Ce qui est marquant dans vos morceaux, c’est l’utilisation de la syncope. Le morceau tombe et puis repart d’un coup.

G : C’est un truc qui nous amuse parce qu’on essaie de ne pas s’ennuyer nous-mêmes quand on fait les morceaux. C’est pour ça qu’on n’arrive pas à faire des morceaux de plus de cinq minutes. C’est juste pour essayer de garder l’auditeur en éveil.

X : Mais ça c’est un peu un risque aussi parce que tu passes tellement de temps sur les morceaux que tu finis par ne plus les supporter. Alors tu rajoutes des trucs partout et tu détruis tes propres morceaux. Et ça nous est déjà arrivé. Et c’est là qu’interviennent SoMe, notre graphiste, et Pedro, qui sont un peu le troisième membre dans la mesure où ce sont eux qui nous disent : « Bon là ça devient trop compliqué, vous avez trop écouté le morceau et vous êtes en train de le détruire ». Donc là on revient un peu en arrière et on simplifie tout. Mais tous les accidents servent à recréer une tension au moment où tu as l’impression que le truc va s’endormir.



On sait que la musique électronique est aussi fonction d’une évolution de la technologie, est-ce que ça a été le cas de votre musique ?

X : Il y a un truc qui a été vachement important pour nous qui n’est pas tant une évolution technologique mais plutôt la découverte de la technologie en elle-même. Je ne sais pas s’il y a beaucoup de choses qui ont changé mais on a découvert l’ordinateur et le pouvoir de ce que l’on peut faire avec, et ça a beaucoup changé notre manière de faire. Le premier maxi qu’on a fait, We are your friends, a été fait sans ordinateur, sans effet, juste avec une boîte à rythmes et un sampler. C’était un enfer. Et après on s’est acheté un ordinateur et on a compris ce qu’on pouvait faire, en tout cas ce qui nous plaisait et ça a tout changé. Mais - et c’est ça qui est bien et qui en même temps est le piège des musiques électroniques – tu es tributaire des émotions technologiques, ce qui est cool mais quand tu donnes trop d’importance à ça, tu fais de la musique de producteur pour les producteurs. Et c’est là où tu perds ce truc pop qui nous plaît. Il y a des morceaux dont on adore la prod’ mais qu’on ne réécoute finalement jamais. On finit par réécouter Steely Dan ou Billy Joel. Cela dit, Steely Dan c’est aussi un groupe de producteurs pour des producteurs.



C’est aussi un vrai groupe de musiciens. Ça vous a tenté de faire de la musique avec des instruments ?

X : Non parce qu’on aime bien le jus électronique, justement, la puissance. On aime bien avoir des émotions pop avec la puissance que tu peux avoir quand tu fais de l’électro. Et c’est ce mélange-là justement qui est intéressant. Je pense que si on était des zicos de studio, si on était des ingénieurs du son incroyables, on ferait juste du Steely Dan électro et ça n’aurait aucun intérêt. Parce que ça serait moins bien quand même que ce qui a été fait avant. Je pense que c’est juste le décalage entre ce qu’on essaie de faire et ce qu’on arrive à faire avec les moyens qu’on a, nos compétences - puisqu’on n’est ni de grands producteurs, ni de grands musiciens - c’est ce décalage qui fait des chansons j’espère un peu modernes et spéciales et singulières.



Cette utilisation pop de la musique, ça vous empêche de faire de la musique répétitive ?

X : C’est aussi parce qu’on n’a pas une grande science du dance-floor. Il y a une règle que nous a donnée Erol Alkan : quand tu fais un edit d’un morceau, en gros, ça passe trois fois plus vite quand tu l’écoutes en club par rapport à quand tu l’écoutes chez toi. Donc tu fais une séquence chez toi et quand ça te paraît faire la bonne longueur, tu la multiplies par trois pour avoir la bonne longueur en club. Et c’est vrai parce que souvent on faisait des morceaux qu’on voulait être un peu club et ça passait beaucoup trop vite quand on les passait. Mais juste on n’a pas la patience et ni l’envie de faire les morceaux par anticipation de leur efficacité club et on réserve ça pour les concerts où on a la liberté de faire cette fameuse multiplication par trois des parties pour que ça soit plus efficace. Et autant ça a un sens quand tu le fais en live autant quand tu es chez tu vois que c’est un peu chiant. On fait des disques avant tout pour qu’ils soient écoutés chez toi ou dans ta caisse. Et après ce truc de recherche de la répétition on le fait tous en live.



Vous testez des morceaux en live ?

G : Non. On teste juste de nouvelles versions des morceaux.

X : L’album on l’a testé en live. On a bien fait attention à ce qu’aucun des morceaux du disques à part D.A.N.C.E et Phantom ne soit joué avant la sortie du disque. Du coup, quand on a commencé à faire des lives, c’était la première fois qu’on écoutait les morceaux avec un gros son. L’album en entier a été testé en live mais depuis on n’a pas fait de nouveaux morceaux. On teste juste des manières de rendre les morceaux plus efficaces, plus tristes ou plus joyeux en live.

G : Comme mettre le pied sur tous les temps.

X : Ça paraît super stupide mais on a découvert ce plaisir-là.

G : Qu’on s’interdisait un peu avant.

X : Parce que ça rend pas très bien en musique domestique. Mais on a découvert ce plaisir-là de faire les choses les plus simples possibles et les plus puissantes possibles en se décomplexant un peu sur la question du mauvais goût. On continue à trouver ça un peu de mauvais goût dans les disques mais en live, c’est un plaisir simple mais efficace.



Est-ce votre éducation artistique qui vous empêcherait de faire quelque chose de plus direct ?

X : On ne s’empêche pas de faire des trucs directs parce que c’est un peu le but de la pop d’être direct et immédiat.

G : On s’empêche les grosses ficelles.



Est-ce que ça vient du fait que vous avez une vision de l’art qui n’est pas seulement liée à l’efficacité commerciale mais aussi à l’idée de porter un sens ?

X : Tout le marketing, c’est quelque chose qui nous a passionnés au moment où on a fini de faire le disque et on s’est impliqués là-dedans tant qu’on a pu. Parce qu’on n’a pas pu suivre tout ce qui se passait avec les labels étrangers mais en tout cas pour la France, on s’est beaucoup impliqués dans toute la stratégie, la communication, les affiches.



Les clips ?

X : On est impliqué juste dans l’idée et après on laisse la réalisation à d’autres personnes qui savent faire mieux que nous. Mais voilà, tu as la musique d’un côté et tout ce que tu fais de l’autre, c’est-à-dire le marketing, qui est un truc qui nous passionne et nous amuse. Et encore une fois pour ne pas qu’il y ait de malentendu, ça n’est jamais dans l’optique de se dire faisons ça pour vendre plus de disques. Mais en se disant : soit le marketing tu laisses faire ça par les mecs de maisons de disques et si tu as de la chance ils sont bons, soit tu t’impliques, tu le fais toi-même et tu fais un produit dont tu es fier encore quand ça n’a pas marché. Parce que quand ça ne marche pas, tu as toujours ce truc-là qui t’a fait plaisir : « c’était marrant, il y avait des bonnes idées ». Les premières pubs qu’on a faites dans le métro, il y avait juste la croix sur fond noir avec la date de sortie en chiffres romains. Il n’y avait aucun logo de label, pas de nom. Pour cent personnes à Paris qui connaissait un peu, ça leur a parlé. Pour les un million d’autres personnes qui sont passées devant, ils n’ont juste pas compris ce que c’était mais au final des posters nous feront encore plaisir quand on les verra dans dix ans quand on se dira : « on a lancé le disque comme ça ». On était parti en se disant que c’était un peu un suicide commercial mais finalement ça ne l’était pas tant que ça, ça a quand même pris. Et voilà, l’industrie du disque nous intéresse aussi en tant qu’industrie, ça n’est pas quelque chose qu’on rejette.



C’est une démarche un peu pop-art : le commerce fait partie aussi de l’œuvre…

X : Bien sûr. Mais je pense que c’est illusoire en 2007 de continuer à croire que tu peux passer entre les mailles du filet. Et après, qui fait de la musique pour ne pas la partager ?

Vous n’avez pas peur du commerce mais vous n’avez pas peur des médias non plus. Le fait de parler de la musique, c’est aussi une continuation logique du fait d’en faire ?

X : Ça dépend des gens que tu as en face de toi et on le fait en sachant qu’une fois sur dix, une fois sur vingt, on va parler de choses différentes de ce dont on parle d’habitude. Mais comme dit Gaspard, ça fait partie du « game » et c’est un choix que tu fais au départ d’utiliser ces supports-là, de t’amuser avec ça ou de le rejeter.



Pour l’instant vous n’avez pas rejeté grand-chose…

G : Des trucs genre aller chez Fogiel. C’est quand même assez limité…

X : Ouais, tu sais que c’est un bon porteur pour vendre des disques mais on n’est quand même pas prêt à tout. En revanche, on est prêt à pousser l’expérience le plus loin possible pour voir jusqu’où on peut emmener quelque chose qui n’est pas pop au départ vers des territoires pop. Et c’est un peu une expérience qu’on fait aussi sur Justice, mais sans cynisme parce qu’on n’est pas cynique. Je le répète encore une fois : on ne fait pas ça pour gagner plus d’argent mais on a notre petit truc entre les mains dont on essaie de contrôler le destin. Et ça fait partie d’un jeu qui nous amuse de voir ce que tu peux faire avec cette matière-là qui est quand même assez difficile au départ. Même le disque, il n’y a pas de nom dessus.



Et la publicité ?

X : On n’a pas de problème avec ça. Tant que la pub est cool, ça va. Et là l’exemple de Peugeot est pertinent. Les mecs qui font la synchro ont quand même réussi à placer Waters of Nazareth qui est peut-être le morceau le plus bruitiste de cette année-là, sur une pub de voiture familiale. Et on a salué aussi cette démarche-là de ces gens qui ont le pouvoir non pas de placer ce qu’ils veulent – parce que le client peut toujours te dire non – mais de mettre des trucs super étranges sur des publicités comme ça. C’est un peu être le ver dans la pomme

G : C’est toujours assez fascinant de te rendre compte que tu peux rentrer dans le salon de la ménagère de moins de cinquante ans par le biais de la télévision même si j’imagine que Waters of Nazareth ça ne lui parle pas trop. Ça peut peut-être… enfin pas « éduquer »… mais c’est une manière de toucher des gens que tu ne touches pas d’habitude.

X : Et je sais qu’il y a une frange de la techno qui nous déteste parce qu’ils nous reprochent d’être trop pute, de faire du divertissement et de ne pas faire la révolution. Et moi j’ai l’impression que la révolution c’est efficace quand tu la fais sur un grand nombre de gens. Faire partie de la musique de pub, c’est faire changer la musique de pub et la pub aussi en elle-même. mettre un morceau sur Fun Radio ou sur NRJ, j’ai l’impression que c’est un peu plus la révolution que de faire la révolution pour dix personnes en faisant de la musique concrète avec des bruits de porte qui a déjà été faite il y a cinquante ans.



Est-ce que vos expériences professionnelles avant Justice vous avaient préparé à vous emparer du marketing ?

X : On était graphistes, c’est vrai.

G : C’est plus ou moins une école pour aller à l’essentiel, au détriment d’un truc de bon goût.

X : Mais ça ne veut pas dire qu’on fait de la musique en essayant d’aller à l’essentiel, au détriment du bon goût. Nous on essaie toujours de faire le truc qui nous nous paraît le plus beau. Le graphisme ça permet de se méfier de l’idée du beau pour la masse. Et parfois ça passe par des trucs que les gens trouvent moches mais où le fond est plus important que l’aspect formel. Parce que finalement le premier degré du graphisme c’est ça, c’est faire beau et le deuxième degré c’est de faire un truc qui est pertinent même si ça peut être moche. Et SoMe a vachement intégré ça, parce que parfois c’est super laid mais l’idée sous-jacente est super drôle. Et lui le sait : pour lui le truc qui est en dessous surpasse ça. Et ça arrive en musique : Waters est un morceau moche. Il ne sonne pas bien, il n’y a pas de basses, c’est super aigu, c’est mal mixé, il n’y a pas d’espace. C’est un morceau moche selon les critères rationnels mais l’image qui est en dessous a finalement renversé le truc et a pris le dessus sur l’esthétique du morceau pour devenir une esthétique standard de l’électronique. En tout cas on est prêt à faire des trucs moches visuellement comme au niveau du son mais parce que ça rend plus pertinent le fond et le sens de ce qu’on a fait.



Ça va avec l’image que vous dégagez vous-mêmes ?

X : Ouais c’est pour ça qu’on a choisi d’être moches… (rires)



Non mais est-ce que c’est important pour vous, même dans votre image, de ne pas vouloir être de bon goût ?

G : C’est sûr qu’on est plus inspiré par Spinal Tap que par autre chose.



X : Le bon goût c’est tellement dangereux. Après de bon goût pour qui ? Justice maintenant c’est un groupe de putes pour des gens qui trouvent que c’est de la musique pute et d’autres gens n’arrivent pas à écouter parce que c’est trop « spé ». Il y en a qui trouvent qu’on est classe et d’autres qu’on est des beaufs et qu’on fait la fête foraine.



Le style, la mode, c’est quelque chose qui vous intéresse ?

G : Tu vois par exemple cette horrible moustache, ça m’amuse plus d’avoir ça qu’un tee-shirt de label et le crâne rasé.



Il y a une volonté de démystification de votre part ?

X : Il y a une partie qu’on essaie de mythifier quand même parce que quand tu sais tout sur tout, ça n’est pas forcément intéressant. Marylin Manson sans le maquillage n’est pas intéressant alors qu’avec tout le décorum l’est. On ment parfois en interview, ou alors on donne des réponses différentes à chaque fois parce que c’est important de ne pas tout donner sur tout sinon tu perds le fun. On a une partie du set-up sur scène qui fonctionne et une autre qui ne fonctionne pas et c’est pour perdre les gens sur ce qui marche, ce qui ne marche pas, ce qui est réel ou non. Pareil quand on arrange les morceaux : qu’est-ce qui est vraiment joué, qu’est-ce qui ne l’est pas ? Qu’est-ce qui est de la vraie basse, qu’est-ce qui n’en est pas ? C’est important de perdre le spectateur sur la manière dont sont faites les choses. Et évidemment que tout n’est pas vrai. C’est important de montrer qu’on n’est pas des gens plus intelligents ou plus malins que les autres gars mais on n’est pas d’excellents musiciens, pas d’excellents producteurs, on fait de la musique avec du matériel que tout le monde peut acheter. Ça veut dire qu’avec des idées simples et du fond, on peut faire quelque chose.

C’est presque une définition du punk et de l’idéologie « do it yourself »…

X : Bien sûr. Nous on le dit souvent : on est là complètement par hasard, on fait de la musique par hasard. Et c’est ça qui nous excite aussi. C’est de faire tous ces trucs-là sans vraiment savoir comment les faire. Un jour, tu vas faire un concert et tu n’en as jamais fait de ta vie : tu trouves une solution en trois jours pour faire quelque chose sur quoi tu peux être ridiculisé et grillé à vie. Mais tu y vas et tu trouves la manière la plus simple et la plus efficace de le faire. Et sur le coup tu te chies dessus et c’est un enfer mais quand c’est fini, tu kiffes. Avec le risque de se planter : on fait de la musique sans savoir écrire de la musique et sans savoir produire. Mais il ne faut pas négliger le côté magique même si c’est un peu « cucul » comme expression.



Vous étiez des clubbers avant de faire de la musique électronique ?

G : Pas du tout. Moi j’étais jamais sorti en club avant de jouer, quasiment.

X : Moi un peu. Quand j’avais dix-sept piges j’habitais seul et je séchais l’école et je mettais du gel dans mes cheveux pour essayer d’attraper des meufs dans les clubs. Et j’y arrivais pas parce que je pense que je faisais trop gay.



Tu vis un peu le succès comme une revanche, alors ?

G : C’est vrai que c’est toujours un peu le même schéma des types qui ne sont pas les plus populaires du lycée, qui finissent par faire de la musique au fond d’une cave et deviennent tout d’un coup populaires.

1 commentaire:

Mazz a dit…

Et ben bravo ! C'était bien cool comme interview.
Mais Gaspard c'est un peu le timide des deux non ?