mardi 10 août 2010

"Des têtes nucléaires...".



Vous êtes-vous déjà retrouvé à devoir expliquer à quelqu'un pourquoi les V.F des années 80 étaient supérieures aux V.O de la même époque ?
Cette étrange expérience, je l'ai vécu il y a quelques jours.
Je ne cesse de répéter à mon frère de 18 ans qu'il faut ABSOLUMENT regarder les films en version originale. Oui mais voilà, lorsqu'il s'apprête à regarder "Tango & Cash" et que vous lui ordonnez de le regarder avec les voix françaises, là, c'est le point d'interrogation...
"Mais pourquoi ? T'arrêtes pas de me dire que c'est TOUJOURS mieux en V.O !".
"Ouais ok, mais là tu vois, les années 80 c'est pas pareil, blablabli blablabla...".
Problème quasiment insoluble, surtout quand vous vous adressez à quelqu'un qui regarde beaucoup de films mais ne va pas chercher au-delà. Evidemment j'explique qu'à l'époque on avait peur de rien, que les insultes et gros mots roulaient à fond dans les virages, qu'on fumait quand on en avait envie, et surtout n'importe où.
"Tango & Cash" est un bon exemple mais à mes yeux il n'est pas le meilleur, on pense aussi à "Predator", "L'arme fatale" et "Piège de cristal" dans une moindre mesure, "Demolition Man" évidemment, mais celui qui dans ma mémoire dépasse toutes les limites c'est "Double détente". Toujours avec Schwarzie hein. On ne compte plus le nombre d'insultes proférées dans ce film. Gloire aux traducteurs. Des traducteurs ? Des auteurs oui ! Nous avons vu presque tous ces films en V.O, et force est de constater que ça n'atteint que très rarement la qualité de la V.F. Les tournures de phrases sont toutes à la fois grossières et subtiles, parfois vulgaires, mais on reste toujours dans le ton, et généralement les "enculé" et autres "fils de pûtes" trouvaient refuge dans un commissariat crasseux de Los Angeles ou New York (exception pour celui de Beverly Hills, mais là le flic qui ramène ses jurons vient de Chicago).
Et les voix dans tout ça ?



Les deux plus emblématiques pour moi resteront sans aucun doute celles de Bruce Willis et Sylvester Stallone (mention spéciale pour Mel Gibson, et donc de Niro, quand même). Respectivement doublés par (le génial) Patrick Poivet, Bruce Willis n'existe pas sans lui. Subtile et rieur avec ce petit sourire en coin qu'on entend à chaque fois qu'il donne sa voix à Willis, Patrick Poivet a définitivement marqué de son empreinte l'acteur américain en France. Qui aujourd'hui pourrait passer derrière lui ? PERSONNE.
Pour Stallone, c'est assez drôle. Généralement doublé par Alain Dorval, il a aussi eu les honneurs de Richard Darbois et Michel Vigné ! Essayez donc de faire la différence de voix entre "Demolition man", "Rocky" et "Haute sécurité". C'est précisément là que l'on se rend compte que tous ces "doubleurs" sont avant tout des acteurs. Ils ont su cerner les personnages et au-delà de ça, dessiner et participer à la construction de ces stars des années 80, qui encore aujourd'hui leur doivent beaucoup.
Mais alors que s'est-il passé après ?
Pourquoi d'aussi mauvaises V.F aujourd'hui ?



Les voix et les dialogues ont suivi la courbe du cinéma et se sont faites plus sérieuses, et puis certainement que les auteurs d'autrefois ont plié bagages, remplacés par des tacherons que je finirais bien dans un style moyenâgeux. Nous sommes tous heureux de voir un chef-d'oeuvre comme "Inception", mais on aimerait aussi de temps en temps se taper un bon film d'action à l'ancienne sans synthèse ni dialogue de merde, servi par des voix charismatiques qui tapent au foie et aux souvenirs. A la place on nous viole John Mc Clane dans un "Die Hard 4" à vomir, et les auteurs de d' Indiana Jones réussissent à cracher sur le mythe qu'ils ont créé dans un 4ème opus de triste mémoire.
Peut-être vaut-il mieux laisser tout ça tranquille, après tout on peut toujours ressusciter nos icônes de testostérone d'un simple "play" sur la commande...
De toute façon Mc Tiernan avait fermé le livre avec son classique "Last Action Hero", et oui tout était dans le titre...
Pour finir, je n'ai pas réussi à expliquer à mon frère pourquoi il vaut mieux regarder les films des années 80 (surtout ceux d'action) en V.F.
Nous regardons cette décennie avec nostalgie, paradis perdu d'un cinéma décomplexé un peu con et grossier, mais aussi très attachant. Nous n'aurons plus jamais les honneurs de telles V.F, c'est la raison pour laquelle nous iront voir "The Expandables" en V.O.
Allez, on se le fera en DVD entre copains, comme on l'aurait fait en VHS à 15 piges un mercredi après midi entre deux parties de F-Zero, un petit visionnage en V.F de rigueur, histoire de voir, enfin, cette scène que nous avons fantasmé entre Willis, Sly et Schwarzie, les voir, même 5 minutes, se balancer des punchlines avec les voix de notre adolescence et les insultes de nos cours de récré, et par la même occasion nous rendre un peu de ce que ces salopes nous ont volé.

Bien à vous et "soyez enculé".

J.

4 commentaires:

darkdavor a dit…

Il m'a mis la petite larme ton post... Drôle de sentiment que la nostalgie !
Concernant le fond, évidemment, la VF '80, c'est du tout bon. Je citerai en plus de ce que tu as dit "Star Wars" (malgré les petites conneries ici ou là) et "Back to the Future" qui apportent un réel quelque chose aux films.
Mais surtout deux films qui, pour le coup, sont vraiment bien bien bien meilleurs en VF (et là, c'est réellement incomparable), c'est "Le maître de guerre" et "Le bon, la brute et le truand". Pour le premier, ceux qui ont fait le boulot, ne se sont pas simplement contenté d'une traduction honnête, mais un réel effort créatif a été fait pour mettre en valeur le langage très fleuri du bon sergent tirailleur Highway.
Pour le deuxième film, je vous laisserai comparer la VO et la VF de la superbe et émouvante scène entre Tuco et son frère le curé... un dialogue qui vous prend aux tripes... en français (VF : Tuco : "Comment vont le papa et la maman ?" / VO : "Comment vont nos parents ?"... l'ajout des articles en VF mettant en relief la feinte indifférence de Tuco envers son entourage opposée au gros plan suivant sur son regard lorsqu'il apprend qu'ils sont décédés. C'est ce genre de détail qui fait la différence !)
Revoyez aussi la scène de la destruction du pont, du feu d'artifice-hommage au capitaine en train de crever. Une VF à tomber !

Elaborer une VF dans les années 80, c'était tout simplement un boulot fait avec professionnalisme, autonomie et enthousiasme.

Play !

Davor, mais en VF, ça fait Dave ;)

Mazz a dit…

Tout cela est juste et vrai.
Seuls certains nés avant une certaine époque peuvent comprendre ça !

Anonyme a dit…

les VF jusqu'au milieu des 90's étaient bonnes (celle des 70's notement). Mais depuis la fin des délais long comme le bras entre la sortie ricaine et la sortie française, c'est tout un artisanat qui tend à disparaître. Là où on laissait l'acteur travailler son rôle, on a maintenant des voix sans charisme pour des films souvent bidons. Donc....

Sonny

Charcuterie du 7ème a dit…

un petit oubli mais après avoir revu 48h, la VF est elle aussi sévèrement burnée.